ÉVéNEMENTS

Compte rendu : Exposition Heinz Berggruen, un marchand et sa collection, Musée de l’Orangerie

18 janvier 2025

16 alumni se retrouvent devant l’entrée du Musée de l’Orangerie autour de Janine Wenk et de Dominique Misigaro, la conférencière appelée à les diriger à travers cette exposition, qui attire un nombreux public, comme en témoignent les deux files d’attente. En tant que groupe, et grâce à notre conférencière, attachée du Musée, comme elle le précise en se présentant, nous pouvons entrer sans attendre et nous procurer les écouteurs qui nous permettront de saisir chacun des mots de notre guide, quel que soit notre position dans le groupe. Les premières informations concernent le lieu : l’Orangerie, bâtiment servant sous le Second Empire à abriter en hiver les orangers des Tuileries, transformé au XXe siècle en musée pour accueillir les Nymphéas de Monet, puis les œuvres de la donation Walter-Guillaume.

Avant de parcourir l’exposition, et devant une photo du collectionneur, Dominique Misigaro esquisse une biographie de Heinz Berggruen (1914 – 2007), une personnalité, propre à retenir l’attention d’un groupe franco-allemand : né à Berlin, il étudie en France, puis aux Etats-Unis. De retour en Europe sous l’uniforme des troupes américaines combattant le nazisme, il se fixe après la guerre à Paris comme marchand et collectionneur d’art moderne, mais vend pour finir sa collection à l’État allemand. Elle est exposée depuis 2000 à Berlin dans le bâtiment qui lui est consacré.

Notre guide concentre sa présentation sur les œuvres des artistes auxquels Berggruen a accordé le plus d’attention : Paul Klee, Picasso, Matisse et Giacometti, et montre leur façon de répondre, dans leurs natures mortes comme dans leurs représentations de la figure humaine, aux remises en question de Cézanne ou de Gauguin, des artistes dont Berggruen a collectionné les œuvres, avant de les revendre pour pouvoir mieux se consacrer à l’acquisition de peintures et sculptures du XXe siècle.

Aussi la visite commence-t-elle par le commentaire d’une petite œuvre de Cézanne concentrant dans la représentation d’une unique « Pomme sur un coin de table » une partie des recherches qui sont à l’origine du cubisme: rapprocher formes naturelles et formes géométriques, synthétiser sur une même image plusieurs angles de vue, réinventer la perspective de manière à présenter simultanément horizontal et vertical, suggérer l’objet par un de ses éléments plutôt que par la représentation de l’objet lui-même… Les natures mortes de Picasso illustrent abondamment ces recherches, qui s’accompagnent le plus souvent d’un certain renoncement à la couleur, réduite à des nuances de bruns et des gris, évoluant parfois timidement vers le bleu ou le vert. Les portraits peints par Picasso dans une période ultérieure mélangent au contraire face et profil dans une certaine exubérance de couleurs vives.

A côté de Picasso, auquel revient manifestement dans cette exposition la part du Lion, Matisse fait presque pâle figure, si on peut dire, car ses papiers découpés et collés de la dernière période présentent au contraire des contrastes de couleurs particulièrement franches et gaies. L’influence du cubisme est toujours là, mais à peine reconnaissable. Elle est à peine reconnaissable également dans les sculptures de Giacometti, qui semblent vouloir occuper l’espace en le fendant.

Les derniers commentaires vont aux œuvres constituant le point fort et l’apport le plus original de la collection Berggruen : des huiles de petit format, dessins, gouaches ou aquarelles de Paul Klee, artiste admiré et acheté par Berggruen dès ses débuts. L’exposition de l’Orangerie leur fait une bonne place. La peinture de ce professeur du Bauhaus privilégie les formes géométriques, mais tracées avec les hésitations de la main, les couleurs franches, mais posées avec délicatesse et formant les unes avec les autres de savants contrastes. Les formes figuratives sont inspirées par les dessins d’enfants ou les graffitis et sont réduites au minimum.

Regroupés à l’issue de la visite autour de leur guide et de leur présidente, les alumni expriment à travers la bouche de cette dernière leurs remerciements pour cet accompagnement compétent et intéressant d’un parcours déterminé par les choix d’une riche personnalité. Le goût du collectionneur jette sur les œuvres collectionnées une lumière aidant à mieux les comprendre, peut-être même à mieux les aimer.

Rédaction du texte : MT

Photos : JW