Jeanette Konrad, la rédactrice en chef de l’émission Karambolage, nous accueille ce mardi 12 décembre à 16h dans les locaux d’ARTE Studio à Vanves. En effet, si le siège de la chaine se trouve à Strasbourg et la plupart des bureaux d’ARTE France à Issy-les-Moulineaux, quelques irréductibles travaillent encore dans les locaux labyrinthiques mais si pratiques de Vanves. Le dessous des cartes, Le dessous des images et le bureau d’ARTE Info Paris sont ainsi regroupés avec Karambolage sous la verrière de ce bâtiment d’inspiration industrielle, aux briques peintes et aux grands aplats de couleur.
Jeanette nous présente son bureau ainsi que ceux de la production et de la création. En tout, une dizaine de personnes travaillent ici pour l’émission. Vincent et Ariane, à l’étage, se chargent des réseaux sociaux. David est au sous-sol dans la salle de montage. Il s’occupe présentement d’une devinette sur le quartier français à Berlin. C’est aussi dans cette salle que se trouve le conducteur de toutes les émissions à venir. Dès que l’une d’entre elles est finalisée, elle est barrée sur un grand tableau.
Un peu plus loin, le plateau de tournage est entouré d’immenses rideaux noirs. Laurent, qui travaille à la production et à la rédaction de l’émission, nous montre qu’ils cachent le fond vert devant lequel se placent les acteurs. Le contraste de cette couleur permettra d’incruster en post-production l’arrière-plan le plus adapté. C’est ici que le traducteur berlinois Hinrich Schmidt-Henkel, bien connu des habitués de l’émission, vient par exemple tourner ses interventions toujours si passionnantes. Les programmes Le dessous des cartes et Le dessous des images prennent également vie ici. Comme la salle de montage, le plateau peut parfois être loué à des productions extérieures à ARTE.
A côté se trouve une toute petite salle pour la prise de son. Saviez-vous que 90% des voix que vous entendez dans l’émission sont celles de la rédaction ? Cela assure une plus grande authenticité puisque chacun lit son propre texte avec une conviction que des acteurs extérieurs peinent parfois à atteindre. Janique est pourtant toute prête à tenter sa chance…
Jeanette nous guide encore jusqu’aux salles de mixage et nous propose ensuite de visionner un épisode tout à fait de saison : la première rubrique, Le mail, présente les différences entre les lettres au Père Noël, au Weihnachtsmann et au Christkind. Le conte narre ensuite comment les frères Grimm ont emprunté en 1812 à Charles Perrault le conte du Petit chaperon rouge paru en 1697 et l’ont germanisé, et comment les deux versions se sont peu à peu mêlées dans l’imaginaire collectif des deux côtés du Rhin. Enfin, nous avons tous trouvé La devinette ! Le compteur Linky était par trop visible…
Vous vous demandez certainement comment se fabrique l’émission créée en 2004 par Claire Doutriaux. Tout part, comme toujours, d’une idée. Elle peut être émise en conférence de rédaction, ou parfois venir d’un mail ou un courrier d’un téléspectateur. Après l’avoir acceptée, la rédaction fait des recherches, consulte des spécialistes et rédige en général elle-même le texte du sujet. L’équipe a très peu changé au fil des années, et maîtrise donc parfaitement le « ton Karambolage ». Contrairement aux autres contenus diffusés sur ARTE, ce texte ne sera pas traduit à Strasbourg mais directement sur place, à Vanves, pour conserver ce fameux ton et assurer que la mise en image sera cohérente : il est par exemple impératif que les mots clefs arrivent au même moment dans la phrase dans les deux langues !
Le texte est ensuite enregistré sur place et constitue la base de travail de l’équipe réalisateur/graphiste qui s’attèlera au sujet. L’émission travaille avec une quarantaine de freelances, en France et en Allemagne. Selon le thème abordé, on privilégie une équipe d’un pays ou de l’autre : eux aussi doivent parfaitement maitriser le sujet ! Environ 25 équipes travaillent toujours en parallèle pour traiter une trentaine de thèmes. Il faut dire qu’il faut compter deux à trois mois de travail, voire un an et demi pour un sujet de 3 minutes 30 ! Le graphiste doit toujours envoyer un story-board assez précis avant de finaliser son travail. Cela permet de s’assurer qu’il va dans la bonne direction, mais aussi que ses propositions seront compréhensibles des deux côtés de la frontière : par exemple, si la signification d’un bonnet d’âne est évidente en France, un Allemand n’y verra qu’un déguisement. Le graphiste devra donc trouver un autre biais pour exprimer son idée.
Quand l’animation est finalisée, le sujet passe encore au bruitage, et enfin à l’assemblage : les différents sujets sont combinés afin de créer une émission de 11 minutes cohérente, franco-allemande et suffisamment variée, avec le fameux générique qui habille l’émission depuis les tout débuts ! En tout, chaque épisode revient à environ 38 000 €, ce qui est très peu. Une publicité coûte près de 10 fois plus cher à la minute.
Les sujets les plus revisionnés ? Les arrondissements de Paris et l’affaire Dreyfus. Les émissions à venir à ne pas manquer ? Les trois « spécial 20 ans » : deux émissions sur Germaine de Staël, cette grande dame du franco-allemand, et une sur les Karambolingiens, dont nous ne doutons pas que vous fassiez aussi partie…
Si certains sujets peuvent être rediffusés selon l’actualité du moment, ce n’est jamais le cas de la devinette. Vous aussi, vous jouez toutes les semaines et ne gagnez jamais ? Sachez que plusieurs milliers de personnes jouent chaque semaine. Persévérez, le succès est au bout du clavier !
Enfin, vous avez peut-être vu passer ces derniers mois des sujets concernant l’Espagne. Pas d’inquiétude : ceux-ci sont réservés aux réseaux sociaux et à internet. Karambolage est et reste bien l’émission franco-allemande par excellence !
Par Frédérique Rault